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Jeux d’argent  : la Cour des comptes veut réviser la loi


le 8 novembre 2016 dans Tendances

Selon un rapport de l’institution, rendu public mercredi, le cadre législatif actuel est insuffisant. « La France n’a pas de politique des jeux bien claire. » C’est ainsi que la Cour des comptes introduit la conclusion de son rapport sur la régulation des jeux d’argent et de hasard rendu public mercredi 19 octobre. Cette enquête en pointe les insuffisances et milite pour une révision du cadre législatif. Le président de la Cour des comptes, Didier Migaud, connaît bien le sujet des jeux d’argent. Il était, en effet, président de la Commission des finances à l’Assemblée nationale lorsque le projet de loi sur l’ouverture à la concurrence des jeux d’argent en ligne a été discuté. (….). A cette occasion, l’Etat a redit les principes qui guidaient sa politique en la matière. La préservation de l’ordre public, la lutte contre le jeu excessif mais aussi la volonté de maintenir les équilibres économiques des filières. L’enjeu est d’importance. En 2015, les Français ont joué 45 milliards d’euros. D’abord dans les casinos qui représentent 38 % des mises, puis auprès de la FDJ (29 %), du PMU (20 %) et des nouveaux opérateurs sur Internet (BetClic, Bwin, Unibet, Zeturf…) qui s’arrogent désormais 13 % des enjeux.

L’affaire est sensible pour l’Etat. D’abord en termes budgétaires. Globalement, le montant des prélèvements est resté stable entre 2011 et 2015 à 4,8 milliards d’euros. Dont 3,5 milliards abondent directement les caisses de l’Etat. Le reste se répartit entre les collectivités locales, la Sécurité sociale, la filière équine et le financement du sport. Sans surprise, l’essentiel provient des casinos, du PMU et de la FDJ dont l’Etat reste actionnaire à hauteur de 72 %.

La Cour des comptes estime que, paradoxalement, la loi de 2010 a conforté les opérateurs historiques. Même si elle reconnaît que, aux côtés de la FDJ qui continue à se développer, les casinos ont traversé une période compliquée et la situation du PMU est fragile.
La Cour souhaite donc que la fiscalité soit réétudiée pour la rendre plus favorable aux nouveaux entrants et veiller à ce qu’elle soit adaptée aux nouvelles pratiques d’Internet. Les rapporteurs prônent aussi un renforcement de la régulation pour lutter contre l’offre illégale. Et un élargissement de l’offre de jeux, en réduisant les durées d’expérimentation et en allégeant les procédures d’autorisation.

Lutter contre l’addiction, la fraude et le blanchiment

La Cour s’est également penchée sur un autre sujet délicat : la protection des joueurs et la lutte contre la fraude. Mettant en exergue ce qu’elle considère comme des manquements. Elle propose l’instauration d’une carte obligatoire pour identifier les joueurs dans les points de vente afin, selon elle, de lutter contre l’addiction, la fraude et le blanchiment. De même, elle souhaite élargir l’usage du fichier des interdits de jeux aux points de vente. Sans oublier d’uniformiser les plafonds d’usage des espèces pour les mises comme pour les gains.
La Cour estime, en outre, qu’il y a matière à renforcer l’éthique des courses hippiques. En prévoyant par exemple des incriminations pénales en matière de dopage et de corruption hippique. Elle s’interroge en particulier sur le développement des parieurs professionnels à l’international, souvent installés dans des pays autorisant l’optimisation fiscale des gains qui s’inspirent des méthodes des traders, et misent des volumes importants juste avant la course. Une pratique jugée déloyale vis-à-vis des autres parieurs.
Pour définir cette nouvelle politique des jeux, la Cour des comptes juge indispensable un préalable : la création d’un comité interministériel comprenant le budget, l’intérieur, l’agriculture, la santé, les sports et l’économie. Et la création d’une autorité administrative indépendante chargée de la régulation de l’ensemble des jeux d’argent.

LE MONDE ECONOMIE | 20.10.2016 à 11h48 | Par Laurence Girard